bus électrique

Bus électriques : hâte-toi lentement

Publié par Arnaud Zufferey, le 5 mars 2021.

Un décès sur cinq serait dû à la pollution de l'air par les énergies fossiles dans le monde, soit environ 8.7 millions de morts par an (source : Cleantechnica, Libération). C'est 4x plus que le Covid, mais infiniment moins médiatisé.

La grande majorité des bus en circulation roule au diesel. Les remplacer par des bus électriques diminue à la fois les particules fines, les émissions de CO2 et l'utilisation d'énergies fossiles. Les bus urbains sont particulièrement bien adaptés à l'électrification : ils roulent lentement, doivent démarrer et freiner souvent ce qui est le pire scénario pour un moteur à combustion et un cas idéal pour un moteur électrique avec récupération de l'énergie au freinage.

Le déploiement des bus électriques est en plein essor : plus de 2200 roulent en Europe et au moins 10 fois plus en Chine. Il y en a aussi plus de 600 en service à Moscou.

Un récent comparatif des pays européens de Transport&Environment montre que le Danemark arrive en tête avec 78% des nouveaux bus en version électrique et que la Suisse arrive parmi les derniers avec 1.9%.

Pourtant la Suisse est plutôt bien placée dans les voitures électriques :

statistiques voitures électriques

Comment expliquer un tel retard en matière de bus électriques alors qu'en 2017 la Suisse montrait une première mondiale, le bus TOSA, fruit du partenariat entre ABB, les TPG, SIG et HESS ?

Un rapport de Transport&Environment donne 5 facteurs de succès pour développer les bus électriques : du soutien politique, du soutien financier, des projets pilotes, des contrats d'acquisition et de déploiement innovants, une approche globale et intégrée du service de mobilité. Peu de ces éléments sont visibles en Suisse, du coup...

Un autre aspect flagrant est le manque de motivation de tous les acteurs : les collectivités publiques se contentent de donner des concessions à des compagnies privées, celles-ci se contentent de bus diesel ou hybrides. Les distributeurs d'électricité investissent des millions à perte pour développer des réseaux de bornes pour les voitures et se désintéressent des infrastructures de recharge pour les véhicules lourds (alors que ces derniers ne vont a priori pas charger 90% du temps à la maison).

La cerise sur le gâteau vient du message qui accompagne la révision totale de la loi CO2 : "Suppression progressive du remboursement de la taxe sur les huiles minérales aux entreprises de transport concessionnaires : à partir de 2026 dans le trafic régional, à partir de 2030 dans le transport régional de passagers, des exceptions sont possibles pour des raisons topographiques." En résumé : actuellement le pollueur-payeur est remboursé et ce n'est pas prêt de changer.

On voudrait freiner la transition énergétique qu'on ne ferait pas autrement. Heureusement avec le Covid on s'est habitués au masque...